Revue de presse - Les années 90 /2
1970 - 1980 - 1990 /1 - 1990 /2 ..
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Le Vif-l’Express du 30 mars 1990

Ecrasés dans les noirs de l’encre, les couples de lutteurs et autres inquisiteurs mis en scène par Jean Goldmann ont gardé des incisions dans le plexi où l’artiste les a imaginés, les rugosités et les accents graves d’une humanité en marche. Nous avons cependant préféré un thème que nous ne lui connaissons pas : le paysage. Nocturne, par exemple ou encore Paysage en noir. Moins préoccupé par l’urgence d’un discours, le graveur s’abandonne davantage aux jeux subtils des ombres aux noirs, y laissant une part de lui même, plus secrète et toute en sensibilité.

Guy Gilsoul

Le Vlan 1990 - Jean Goldmann quarante ans d’un combat silencieux

(…)
Journaliste, critique, Jean Goldmann est avant tout artiste. Voulant quelque peu contre carrer sa modestie légendaire, la galerie du parvis a pris l’initiative de lui offrir une exposition retraçant ses 40 ans de carrière. Son talent est une certitude mais l’homme est tellement altruiste qu’il a passé la majeure partie de sa vie à défendre la carrière des autres avant de se préoccuper de la sienne. Dans ce monde artistique où les dents sont longues et la tendresse pas forcément une caractéristique, la galerie du parvis et son directeur Daniel Van Wiemes ont estimé qu’il était juste de placer Jean Goldmann à l’avant scène/ L’œuvre de Goldmann peut se résumer sous le mot « amour » : Amour de l’homme et de la femme mais surtout de l’être humain, vulnérable pour nous mettre en garde contre l’insensibilité de notre société. Chacune de ses toiles, chacune de ses gravures nous apostrophe et appelle une remise en question.

 Pierre Bruylandt

Le Soir des 8 et 9 décembre 1990 - La ville blessée de Jean Goldmann

Qui a dit que si la critique est aisée, l’art est difficile ? Jean Goldmann est là pour contrarier les vieux auteurs, car critique d’art, il est artiste lui-même. Voici une vaste rétrospective de sa production : lavis, gravures mais surtout toiles dont certaines de belles dimensions. C’est que Goldmann se rattache au « muralisme ». Si parfois l’exotisme relatif du Luberon aiguise son inspiration, c’est Bruxelles qui accapare son intérêt : paysage urbains, mais aussi vues de la ville éventrée. "J’aime rappeler la fragilité des êtres et des choses" dit-il. Le mur démoli dénude la maison. Il reste un fragment de vie, un papier peint, un escalier qui ne donne nulle part » Un art tendre et terrible dont les personnages sont comme aplatis par le destin de l’humanité. Ou ignore superbement le tragique de leur routine, comme les équarrisseurs des abattoirs d’Anderlecht

P Caso

AAA - Décembre 1990

La fiche biographique de Jean Goldmann (comme confrère critique, il se nomme Jean Cimaise) indique que « né aux portes du Payottenland, il a appris à nager dans le ruisseau où Bruegel noie ses aveugles ». Si nous voulions interpoler, nous pourrions dire qu’il lui est resté un sens aigu du coté dramatique et tragique de la condition humaine, mais aussi une foi profonde dans la force dynamique de l’homme. Ses dessins et ses toiles baignent le plus souvent dans une atmosphère d’ombre et d’incertitude menaçante ; mais ils contiennent aussi un mouvement plein de détermination et de ressort.

 Sans signature

« Libertés » 19/12/90 - Tout un chemin de vie

Tout un chemin de vie, à forte cohérence humaine, qui certifie que l’aventure est au bout de la rue, au creux de la chambre, avec les cicatrices intérieures, extérieures et les flambées de joie furtive…

Jean Goldmann pour sa rétrospective, brouille les chronologies méticuleuses et façonne les ilots thématiques : sites urbains disparus de notre ville « bruxellisée » assemblée de portraits aux tonalités toutes subjectives qui bivouaquent entre méditation et mélancolie et saga quotidienne de nos frères terriens.

On remarquera que la palette du peintre Goldmann possèdent ses gammes très personnelles qui osent les oranges, les verts stridents mais affectionnent aussi les bleus, les mauves mystérieux souvent activés par des éclats de lumière où parfois le jaune claironne.

Dans ce parcours substantiel, je choisirai quelques haltes imagées qui m’interpellent particulièrement. Floréal, en surplomb dit l’intimité capteuse de lumière. Chant vert et rose de la nudité féminine.

Rêve dissocié du fumeur. Une tension existentielle met en exergue la fragilité de cet instant privilégié. Chaussée d’Ixelles montre d’une façon incisive le dos des maisons éventrées. Litanie des vécus effacés à jamais.

L’ambiance est crépusculaire et un visage harassé, en avant plan, semble gérer les oublis. La course, lavis enlevé avec maîtrise, nous offre une sensualité en mouvement, en plein élan….

Comme une effigie d’espoir. Les abattoirs dans leur construction trapue, solides, rassemblent bourreaux et victimes dans un rituel de routine où les éventrations viscérales deviennent symbole de répression aveugle.
Et le multinational peep-show, dans un mauvais goût revendiqué montre les regardeurs décideurs scrutant la lutte de deux miséreux. Fulgurance des peaux quasi rouges. Ainsi se développe la quête de Jean Goldmann. Célébration du cantique de chair toujours mis en alerte par l’orage latent.

Destins particuliers agglutinés dans la marmite de l’Histoire. Des dessins, des gravures, des peintures qui n’organisent pas l’évasion mais qui témoignent en toute fraternité. Dulle Griet, au visage égaré chevauchent un âne monstrueux qui veut toujours fomenter sa religion de carnage. Mais les rondeurs d’enceinte fredonne l’harmonie têtue des sèves.

Jo Dustin

Invitation Exposition 1993

Jean Goldmann est né le 9 février 1922 à Anderlecht, aux portes du Pajottenland cher à Bruegel. Il a participé à une très large part de la riche et tumultueuse aventure de l’art pictural de ce siècle. (…) Il expose depuis 1948

Acteur talentueux comme peintre et graveur, observateur à la fois subtil, fraternel et exigeant comme critique d’art sous le pseudonyme de Jean cimaise et comme homme témoin engagé et lucide, il mène bataille depuis un demi-siècle pour le réalisme. Il fut entre autre choses, co-signataire du Manifeste du Mouvement Réaliste (1969) avec notamment Jorg Madlener, Dulieu, Verhofstadt, Vervish, Mandelbaum, Jacques Muller et Somville.
Son art est intimiste, expressionniste : Jean Goldmann est un amoureux de la vie, de la femme. Son regard sur l’homme est irrésistiblement chargé d’émotion.

Sans signature

Introduction à l’exposition à la galerie Marc Dengis 1997

Peintre, Graveur, critique d’art, Jean Goldmann est effacé, discret, d’une grande gentillesse. Il parle peu, sourit aimablement, laisse apparaître dans son regard une lueur malicieuse.
Il s’est prononcé pour le réalisme, le muralisme, pour la dignité humaine et n’a pas caché qu’il était contre le terrorisme intellectuel exercé par les tenants officiels d’un art qui répudie la nature et la vie.

Il s’est fait apprécier des collectionneurs d’estampes et de dessins pour ses pages savoureuses et souvent dionysiaques.

On est donc parfois surpris et séduit par un ensemble d’un parfaite cohésion, en prise directe avec la vie, où, à coté de paysages de ville ou de banlieue, dans le voisinage des filles grasses à l’exubérance débridée, on découvre tout à coup des grandes toiles de nus, d’une remarquable dignité, des compositions à personnages et des portraits imaginaires.

La pâte est soignée, la couleur grave, l’éclairage savant et efficace. Jean Goldmann a trouvé un langage typiquement expressionniste, celui qui selon sa propre explication surgit au creux de la déchirure entre deux visions contradictoires du monde, chaque fois que l’artiste à mal à l’homme. Ces curieux personnages et son œuvre sont à découvrir.

 Stéphane Rey

Introduction à l’exposition à la galerie Marc Dengis 1997

Jean Goldmann, c’est la recherche de chaleur humaine, de tendresse, de rencontres. Toute sa vie tend à protéger ce qui est vulnérable, vrai.

Et la bataille menée ensemble depuis plus de quarante ans pour le réalisme, pour un art authentique, pour un art public contre le terrorisme intellectuel, contre un monde que l’idéologie dominante tente de réduire et de fragmenter, notre bataille commune pour sortir l’art de ses aliénations, pour retrouver la grande voie humaine, les gens, la rue, l’amour et la liberté, une autre manière de penser et de vivre, a scellé notre amitié.

Roger Somville